[ Note de Philippe G. : second billet de Matthias Jambon-Puillet republié sur ce blog ! Avoir avoir exploré les comics urbains, « LeReilly » pose ici son regard d’écrivaillon sur la marche urbaine… sous endorphines.
J’ai toujours été surpris de voir la marche en permanence qualifiée de « mode doux » et surtout lent, à l’opposé de mon expérience personnelle de « slalomeur urbain » et de « piéton-matador« . Qui a décidé que le piéton se devait d’être un flâneur endormi ? Le souci est justement qu’une telle vision de la marche urbaine nuit considérablement à sa crédibilisation auprès du grand public. Si l’on souhaite augmenter la part modale de la marche, il faudra démontrer qu’elle ne se limite pas aux promenades du dimanche. Ce que fait ici Matthias, à sa manière… Qu’il en soit remercié !
Pour aller plus loin : mon compte-rendu du forum Chronos sur la marche, et surtout ce billet de Transit-City, pour qui nous assistons peut-être au « basculement de l’imaginaire de la performance et de la vitesse habituellement associé à la voiture, au profit du piéton« . Tout est dit :-) ]
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Quand on court, on va plus vite que quand on marche.
Je préfère commencer par là, parce que visiblement c’est pas clair pour tout le monde. Prenez Paris. Pour voir un Parisien courir, il faut qu’il ait peur de manquer son métro/bus/tram. Le reste du temps, dans les couloirs du dit métro, dans la rue, le long des promenades, ca avance mollement. En pilotage automatique, la masse a un temps de réaction proportionnel à sa vélocité. Si par malheur un objet est propulsé à une vitesse supérieure à la sienne, la masse ne réagira jamais à temps pour l’éviter. Je le sais parce que depuis que j’arrive à mettre un pied devant l’autre sans me vautrer, je cours.
A Lyon, une de mes activités préférées est de slalomer entre la foule dans la rue piétonne de la République. La plupart des gens sont ailleurs, dans leurs pensées, dans leurs discussions, dans leur fatigue de vivre. Alors je cours à contrecourant, je bondis de gauche à droite, fais crisser mes chaussures sur la pierre avant de profiter d’une ouverture pour piquer un sprint. A Paris c’est pareil. Je cours dans les couloirs du métro, je cours dans les allées du salon du livre, je cours dans les couloirs du bureau, je cours pour gruger un feu qui vient de passer au rouge. Puis j’essaie d’aller du taf’ jusqu’au métro en courant d’une traite, de chez moi jusqu’au Monop’ dans l’arrondissement d’à côté.
Je cours pour deux raisons, parce qu’on va plus vite que quand on marche et parce que ça pique.
Les gens font comme s’ils tenaient absolument à gagner du temps dans leurs déplacements, ce qui va de l’escalade d’escalateur à l’achat et l’entretient d’une voiture. Mais ils ne courent pas. Je trouve ça absurde de manque de logique interne. Même si, effectivement, courir ça pique. Ça accélère le cœur, ça tire sur les muscles des jambes, ça tape sous la semelle, ça fait suer. Les vrais gens n’aiment pas être bousculés. Ils sont pour aller vite, mais assis, ou alors en un seul morceau. Paradoxe des types qui vont courir une heure dans le vide le weekend mais pas le reste de la semaine où ça pourrait leur servir à quelque chose. Moi, j’aime être à bout de souffle, les joues pourpres. J’aime me coucher avec mal aux muscles, après m’être étiré sur la pointe des pieds.
Au delà de ça, je cours aussi parce je que peux.
Par opposition à ceux qui ne peuvent pas et qui crèverait de le faire (j’en reparlerai). Alors je vis en baskets, je ne porte des semelles plates que lorsque j’y suis obligé. Même mes converses prennent la poussière. Et je me fous de ce qu’on me dit, je me fous des grognement des veaux qui sursautent sur mon passage. Que ce soit pour quelques dizaines de mètres ou une borne, quand je peux, je cours.
Moi aussi j’aimerai bien..mais c’est tout simplement anti-social!
Apres tu pues, t’es sale et t’as plus de collègues mais des ennemis qui te regarderont d’un regard noir.
Bref ingérable avec un boulot classique.
Ah non, pas cette expression des « vrais gens » ici ! Quand même, le pléonasme dans toute sa splendeur.