Filmer l’Île-de-France
La ville de Céline Sciamma est d’abord francilienne. Originaire de Cergy-Pontoise, formée à Paris[2], elle retranscrit une part du quotidien dans lequel elle a grandit et évolué dans ses films. Naissance des Pieuvres se déroule presque intégralement à Cergy-Pontoise, justement ; Tomboy est filmé à Vaires-sur-Marne ; l’action de Bande de Filles se déroule à Bagnolet, Bobigny, La Défense et Paris.
Sans être représentante de l’office du tourisme de l’Île-de-France, cet attachement premier de Céline Sciamma permet de montrer ce que l’on appelle communément “la banlieue” dans ses diversités, toujours avec une recherche esthétique. On sort des sempiternelles images grises, caméra au point auxquelles ont pu nous habituer tant les reportages sur les quartiers dits “sensibles” que les films traitant de ces mêmes quartiers, comme La Haine ou L’Esquive. Et on (re)découvre une Île-de-France harmonieuse dans ses formes, symétriques avec les Douze Colonnes que l’on voit dans Naissance des Pieuvres par exemple, ou colorée dans Bande de Filles. La Petite Couronne sait aussi se montrer verte devant la caméra de la réalisatrice, dans Tomboy où l’on joue en forêt et sur des plans d’eau, mais aussi dans Naissance des Pieuvres où les résidences pavillonnaires de Cergy-Pontoise apparaissent bien végétalisées.
La ville comme support de récit
Mais à quoi cela sert-il de mettre en scène cette banlieue ? Eh bien pour les mêmes raisons invoquées dans les articles précédents (et certainement également ceux à venir) de cette série : pour soutenir le récit du film. Dans les trois premiers films de Céline Sciamma, le choix de la banlieue (espace peu excitant dans un imaginaire collectif un peu daté), permet d’ancrer l’action dans une réalité concrète et de donner un contexte socio-culturel supplémentaire. Les quartiers montrés dans Naissance des Pieuvres et Tomboy inspirent une classe moyenne globalement tranquille. Ils contrastent avec ceux de Bande de Filles, qui dans un premier temps vont nous rappeler, spectateur·trice·s, aux reportages racoleurs sur les “quartiers sensibles”.
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